Mago Sales - Le curé magique |
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Voicì Domenica, 30 Dicembre 2001 00:00
L'homme d'Eglise a fait de la magie sa profession de foi. Et il a donné le goût du spectacle au tranformiste Arturo Brachetti.
Le portable dans une main, l'agenda électronique dans l'autre, l'œil rivé sur Internet, Don Silvio Mantelli, plus connu sous le nom de Mago (mage en italien) Sales, n'est décidément pas un prêtre or dinaire. Chaque matin, après la messe, il tombe sa soutane et regagne son association. Installée dans les quartiers sud de Turin, c'est un véri table temple dédié à la magie qui comprend un magasin de farces et attrapes, un bar et un théâtre de 60 places. Car, quand ce n'est pas pendant l'office, Mago se donne en spectacle ici (et partout ailleurs dans le monde).
«Parfois, la messe dure deux heures parce que j'introduis des numéros de magie. La foi, c'est une conviction individuelle; la magie, c'est une façon d'être, de communiquer avec des adultes, des jeunes et surtout les enfants. »
Même mère Teresa est tombée sons son charme
Depuis huit ans, Don Silvio met en pratique cette profession de foi en parcourant le monde, du Vietnam au Brésil en passant par l'Afrique, pour amuser les gosses des rues.
Avec les bénéfices de son association*, il adopte des enfants, construit des écoles, des orphelinats et, à Katmandou, un hôpital a même été financé avec la seule recette annuelle du magasin!
A ce jour, Mago a accueilli 1050 gamins. Quand le curémagicien passe voir « ses petits », il leur remet le fruit de son travail au terme d'un show de 90 minutes. « La religion c'est mon intériorité, ce qui me donne de la force, du courage et de l'espoir. La magie me permet de m'extérioriser et de donner aux enfants ce que j'ai reçu. » Même mère Teresa est tombée sous le charme de celui qui ne se présente jamais, d'emblée, comme curé. «Je ne fais pas, précise-t-il, d'évangélisation.
J'aide les gamins de toutes religions. D'ailleurs, j'aimerais aller en Afghanistan.»
Et dire que, dans sa famille, on le voyait avocat ou médecin! Lui commence d'abord par enseigner l'italien dans un lycée, puis, poussé par ses parents, il entame des études de médecine avant d'être touché par la grâce et d'entrer au séminaire. Là, il se distingue déjà par sa fantaisie. « Un ami de mes parents m'a appris à manipuler les cartes pour gagner au jeu, c'est comme ça que je suis entré en magie. J'ai toujours voulu faire ce métier. » Il s'inscrit alors à un club de prestidigitation, mais la discipline du séminaire l'empêchant de sortir, c'est son père, employé de banque, qui suit les cours à sa place. « Il me les réapprenait ensuite. J'étudiais la théologie et la philosophie le jour. La nuit, je dévorais des manuels de prestidigitation. » Provocateur, original? Mago est d'abord le digne héritier de saint Jean Bosco (1815-1888), fondateur de la Société de SaintFrançois-de-Sales (ou Salésiens), qui fut, entre autre, un magicien reconnu.
Mago a créé son association en 1993, au terme de sa rencontre avec Paulinho, un petit Brésilien atteint de la lèpre. « Il m'a demandé non pas de le guérir mais de retrouver ses parents. Je fais de la magie, pas des miracles... De retour en Italie, j'ai voulu ouvrir des orphelinats. »
Transformer l'eau en vin... Tentant pour un prêtre
S'il n'a pas revu ses parents, Paulinho a aujourd'hui un toit et veut, lui aussi, devenir « mage ». Mago l'enchanteur susciterait-il des vocations? Il a, en tout cas, contribué à celle d'Arturo Brachetti, son élève à l'Istituto San Luigi de Chieri (près de Turin) dans les années 70. « Arturo, se rappelle Mago, ne voulait pas être prêtre. C'est son père qui réalisait, à travers lui, ce désir. Il était timide. Je lui ai appris à transformer l'eau en vin. » Depuis, Arturo a trouvé le succès mais pas perdu la mémoire: «Mes copains me prenaient pour leur souffre-douleur, le père Don Silvio m'a appris des tours pour les épater, se souvient-il. Dès lors, ils ont cessé de me taper dessus. »
Pour remercier son maître, Arturo a donné à l'orphelinat de Korogocho, au Kenya, la recette d'une soirée. C'est là que Mago passera Noël, en se produisant devant ses petits protégés. Une ultime répétition avant sa grande prestation du 30 janvier au Vatican devant le Pape. Rien que d'y penser, Mago a les yeux qui brillent. Cette journée sera magique, c'est sûr.
NATHALIE DELBRAIS
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